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Témoignage Yannick

Je suis Yannick. Je ne sais pas trop quoi raconter et comment me raconter.

Je ne vais pas mettre en avant la maladie mais exposer un bout de mon histoire et de ma personne. La maladie (syndrome HDR, hypoparathyroïdie génétique sévère) est une composante de moi depuis de nombreuses années. Diagnostiqué en mars 2003, son histoire avait commencé bien avant, faute à une mutation génétique. La vie est ainsi faite.

Durant ces 20 dernières années, elle a évolué et évolue encore. Je l’ai intégrée dans ma vie avec toutes ses agitations et ses contraintes. C’est une composante de ma personne. Je l’ai acceptée telle qu’elle est et non comment je voudrais qu’elle soit. L’acceptation n’est pas innée mais s’acquière. La notion de temps est fondamentale dans cette affaire. Nous sommes tous inégaux face à cet élément. L’important , ce n’est pas d’aller vite mais de constituer son propre temps. Chacun a un temps différent. . Ne pas l’accepter c’est de mon point de vue prendre le risque de perdre une partie de soi et de ne pas vivre sa vie tel qu’on est. J’ai assimilé cette maladie, elle est en moi et m’accompagne quotidiennement. Je ne l’ai pas apprivoisée. Je l’ai écoutée et posé un nouveau regard sur moi. Je me suis construit un nouvel équilibre.

Je l’ai construite au fil des années en prenant en compte l’ensemble de ses composantes (son évolution, ses symptômes, son impact au quotidien, les contraintes médicales) et de mon quotidien, de mes envies de ma famille. Durant 18 ans, elle n’a pas interféré dans ma vie au quotidien. Et du jour au lendemain, en août 2020, un premier malaise (depuis 2003) vient remettre en lumière cette maladie. Ces trois dernières années, son évolution s’est accentuée de façon importante et j’ai franchi un nouveau cap. Elle est devenu handicapante au quotidien. Je ne peux plus faire des choses comme avant. Ce terme peut faire peur. Je le connaissait déjà. Le syndrome s’est immiscé dans ma vie de bonne heure. Il ne me quitte jamais celui-là. J’ai été diagnostiqué en 1971 d’une surdité moyenne et appareillé en 1972, reconnu travail handicapé. Cette nouvelle étape est un tournant, elle a crée un déséquilibre bouleversant dans mon quotidien.

Une nouvelle réalité m’est apparue. Je ne peux plus faire certaines choses. Je m’épuise rapidement, la fatigue est devenu chronique et tenir une journée entière est difficile. Fidèle à ma vision de la vie, j’ai pris le temps de m’interroger avec cette nouveauté. Deux questions me sont apparues essentielles à ce moment-là : comment je souhaitais poursuivre mon chemin de vie ? Et qu’est ce qui était prioritaire ou pas ? Je me suis rendu compte que je ne peux plus faire des activités (j’étais bénévole au festival hellfest, du sport, des gros travaux, etc….). J’ai choisi d’accepter et de faire le deuil. J’ai choisi de me concentrer sur tous les possibles dans mon quotidien et de mettre mon énergie dans l’accomplissement d’activités ou autres qui me font aller de l’avant et procure un bien être. Il m’a fallu encore une fois reconstruire un nouvel équilibre qui passe aujourd’hui quotidiennement par l’anticipation et adaptation. Je suis un peu hyperactif. Je fais des petits travaux, je m’occupe du jardin, de la maison (j’ai de quoi faire avec 145 mètre carré), j’aime la musique, le cinéma, etc… J’ai dû repenser ma manière d’agir au quotidien en écoutant mon corps, les conséquences de la maladie. L’anticipation et l’adaptation sont les deux pierres de mon nouvel édifice. Ils me permettent aujourd’hui de vive pleinement en harmonie avec ce que je suis. A l’heure où j’écris, ce fonctionnement est devenu naturel. Par exemple, quand je vais à un concert le soir, je prends le temps de me reposer dans l’après-midi. Je sais aujourd’hui quand j’entretiens mon jardin, je ne dépasse pas 1h à 1h30 d’activité, etc…. L’écoute de soi est fondamentale. Aussi, une nouveauté est apparue dans les échanges avec les médecins. Et ce n’est pas rien, c’est l’invalidité.

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Quand j’ai bien réfléchi, la question de l’invalidité est apparue comme une suite logique au vu de l’évolution de l’impact de la maladie. J’ai bien vu la difficulté à accomplir une journée. J’ai aussi expérimenté pendant 6 mois et demi un mi-temps thérapeutique et découvert mes nouvelles difficultés. Durant 7 mois, j’ai commencé à faire le deuil du milieu professionnelle et opéré un changement de cap (encore une fois). Il n’était pas question de rester sans rien faire. Il était important au-delà de la famille d’avoir un réseau social et des occupations. Il est important d’être bien dans sa tête comme dans son corps. J’ai accepté la futur démarche d’invalidité. Et hop encore un nouvel équilibre à construire, je m’ennuie jamais. J’ai choisi d’anticiper. De tout façon, les dés étaient jetés . Une reprise du travail n’est plus possible. A partir de là, je me suis projeté sur ce que j’avais envie de faire. Le cinéma m’est apparu comme une évidence. J’ai été vers le milieu associatif et commencé mon bénévolat en mai de cette année. Puis, j’ai voulu me rapprocher d’un milieu que je connais bien, la précarité (j’ai été travailleur social pendant plusieurs décennies dans l’hébergement pour SDF). J’ai commencé un second bénévolat ce mois de septembre au secours populaire. Aussi, suite aux échanges avec le corps médical du CHU de Nantes, j’ai contacté votre association. Par ailleurs, je poursuis mon activité favorite les concerts, le rock’n’roll est un grand compagnon. Il m’est important d’être dans une dynamique positive, d’atteindre une certaine plénitude, un accomplissement de moi. A ce jour, je suis content du déroulement de mes activités. Je suis accepté comme je suis et j’acquière une reconnaissance. J’ai été contacté par la CPAM le 25 septembre qui a validé la future demande d’invalidé. Je n’ai pas été surpris par la méconnaissance du médecin de la sécurité sociale. La dame me dit « mais quand serez-vous soigné ? Avec le traitement c’est stable. » Sans commentaire. J’ai ri dans ma tête. Je lui en veux pas, ce que j’ai est très peu connu.

C’est une quête sans fin, c’est la vie. Elle n’est pas linéaire. Il est question d’équilibre permanent. Le chemin n’est pas fini. Quelle sera l’évolution de la maladie dans 2 ans, dans 5 ans, etc… je m’en fous. Ce qui est important pour moi, c’est de vivre au présent et à moyen terme. Je poursuis ma route épanoui.

Je voudrais finir avec une note d’optimisme. Un livre me poursuit depuis 35 ans, le conte philosophique de Voltaire Candide ou l’Optimisme. Une notion de cet ouvrage me parle énormément, la métaphore « il faut cultiver son jardin » prend tout son sens dans une histoire comme la mienne. Je l’ai transposée à ma façon « il me faut cultiver ma vie », c’est à dire tracer des sillons, façonner les éléments à la fois de mon for intérieur et extérieur, m’adapter et d’aller vers un équilibre qui me convienne.

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