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Ensemble, allons vers la coopération thérapeutique

Vous avez certainement vu dans la presse que la piste d’athlétisme du Stade de France a troqué ses tons ocre pour des nuances d’indigo afin d’accueillir les épreuves sportives lors des Jeux olympiques et paralympiques cet été ? Après avoir paré de rouge la piste du Stade de Tokyo pour les derniers JO en 2021, en référence au ton présent sur le drapeau japonais, l’entreprise qui a fourni le revêtement des pistes pour Paris 2024, a décidé cette fois d’opter pour un violet inédit. L’objectif : respecter le code couleur de la charte graphique de l’Association Hypoparathyroïdisme France !!! 😉 (Bon ok, c’est une boutade, vous avez compris que le choix de cette couleur violette n’est pas pour soutenir Hypopara France, même si ça aurait pu être une chouette idée … On a bien le droit de rêver, non ?!).

Quoi qu’il en soit, cette piste d’athlétisme peut nous servir de métaphore pour illustrer certaines attitudes adoptées par certains professionnels de santé (heureusement pas tous !) dans la relation « soignant-soigné » : à l’instar des athlètes qui se doivent de rester dans leur couloir respectif pour ne pas être disqualifié lors d’une compétition sportive, chaque soignant reste dans son couloir lors de l’accompagnement du patient, respectant scrupuleusement tout ce qui attrait à sa spécialité et sans prise en soins du patient dans sa globalité. Et par mimétisme, le patient cloisonne également – voire même s’auto-censure – en sélectionnant les informations qu’il juge peu ou pas utiles de transmettre à tel ou tel praticien, estimant que cela n’a rien à voir avec son domaine d’expertise.

Un patient qui a les connaissances pour comprendre sa maladie a une plus grande probabilité d’adhésion aux soins

De nombreuses études établissent un lien entre l’information transmise par l’équipe soignante, la qualité des échanges avec le patient et l’observance thérapeutique et montrent que cette relation « soignant-soigné » conditionne la qualité globale de la prise en soins des patients. Une revue de la littérature a été menée sur les dix dernières années afin de montrer l’impact du discours des soignants chez les patients, concernant notamment le vécu de la maladie et l’engagement dans la démarche thérapeutique.
 
Cette méta-analyse inclut des attitudes de soin très variées allant d’une relation autoritaire (dans laquelle le patient est passif) jusqu’à la coopération thérapeutique (participation active dans laquelle le patient décide de devenir acteur de sa santé). Les soignants qui communiquent davantage avec leurs patients et leur délivrent plus d’informations pour les aider à mieux comprendre leur maladie obtiennent de meilleurs résultats en termes d’adhésion aux traitements. Ils améliorent également la relation avec leurs patients en créant un climat de confiance. La réciproque semble aussi vraie : la bonne expérience médicale entraînerait une bonne adhésion aux soins. De même, les patients qui acquièrent plus de connaissances sur leur maladie comprennent davantage l’importance de leur traitement et le jugent ainsi moins contraignant.

La démarche participative d’empowerment

De nombreux auteurs font le lien entre la valeur éducative de la communication et le discours motivationnel du soignant avec la capacité pour un patient de gérer de manière autonome sa maladie au quotidien. On parle d’empowerment (ou auto-détermination).
 
En 2021 en France, 37.5 % des personnes âgées de 16 ans ou plus, vivent avec une ou plusieurs maladie(s) chronique(s). Le nombre de personnes atteintes de maladies chroniques étant bien supérieur au nombre de soignants, au lieu de parler classiquement de relation « soignant-soigné », ne devrait-on pas plutôt mettre le patient en première place et parler ainsi de relation « soigné-soignant » ? Remettre le patient au centre de toute prise en soins, c’est bien l’objet de la loi Kouchner promulguée en 2002.
 
Dans cette optique, de plus en plus de personnes atteintes de maladies chroniques, et placées encore trop souvent au second plan dans le soin, désirent aller dans une démarche plus individuelle. Elles revendiquent un savoir expérientiel et un besoin d’agir au sein du système de santé. On retrouve ainsi des associations de patients qui, par exemple, participent à la rédaction des référentiels de bonne pratique en collaboration avec les centres de référence ou à l’évaluation de produits de santé. Ou encore des représentants de patients ayant des sièges dans des institutions publiques à caractère sanitaire ou au sein des comités éthiques qui délivrent les autorisations aux projets de recherche. Ou même, des patients-enseignants au sein des facultés de médecine. Et aussi des associations de patients-experts formées en éducation thérapeutique qui participent à l’accompagnement des patients autour de leur santé, et mettent en avant leur compréhension du vivre au quotidien avec une maladie. En créant une communauté solidaire bien informée sur sa maladie, notre association Hypoparathyroïdisme France explore toutes ces voies pour améliorer la prise en soin de notre maladie et le quotidien des patients.
 
À la manière du « ne faites rien pour nous sans nous » du mouvement international des personnes porteuses de handicap, l’empowerment est un enjeu majeur de santé publique en termes d’efficacité et de qualité des soins.

Une approche centrée sur le patient

En favorisant l’émergence de compétences pour allier son quotidien avec une pathologie chronique, l’éducation thérapeutique contribue à développer l’alliance thérapeutique. Cette démarche renforce sa relation avec l’équipe soignante et lui confère une meilleure qualité de vie. Le patient devient un véritable pilier sur lequel les professionnels de santé peuvent s’appuyer pour améliorer, de manière pérenne, la qualité des soins prodigués.
 
Ainsi, pour revenir à notre métaphore citée en introduction (en se référant à la photo de gauche), plutôt que de rester chacun dans son couloir sur la piste d’athlétisme, il semble préférable que l’ensemble des soignants et le patient s’allient et avancent ensemble, en concertation interdisciplinaire, dans le respect des principes d’une médecine plus humaine, tout comme le montre la photo de droite illustrant la marque de solidarité et de coopération apportée par des coureurs à un autre athlète, lui-même en difficulté dans les derniers 150 mètres de la course, en l’aidant à passer la ligne d’arrivée, lors du marathon de Londres de 2017.Pour avancer ensemble dans l’intérêt des uns et des autres.
 
La loi Kouchner (4 mars 2002) relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a entraîné un changement de paradigme dans le système de santé, en remettant au centre de la relation de soins le principal concerné, le patient pour qu’il devienne acteur de sa propre santé. Cette nouvelle législation incite les soignants à informer les patients sur leur état de de santé (ils ont notamment la possibilité d’avoir accès à leur dossier médical) et de rechercher leur avis sur les stratégies thérapeutiques à adopter (décisions partagées), leur permettant de s’impliquer pour leur santé.
 
Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

Nos références

– Hall J, Roter D, Katz N. Meta-analysis of correlates of providerbehavior in medicalencounters. Med Care 1988;26(7):657—75.
– Gross O. L’engagement des patients au service du système desanté. Doin: La personne en médecine; 2017. p. 168.
– Liira H. Patient information for betterhealthoutcomes in primary care. Scand J Prim Health Care 2011;29(2):65—6.
– Lee W, Noh Y, Kang H, et al. The mediatoryrole of medicationadherence in improving patients’ medicationexperiencethrough patient-physician communication amongolder hyper-tensive patients. Patient PreferAdherence 2017;(11):1119—26.
– Insee-Drees, EDP appariée aux données de santé du CNDS, calculs Drees.
– Fayn MG, des Garets V, Rivière A. Mieux comprendre le processus d’empowerment du patient. Rech En SciGest-ManagSci-CiencGest2017;119:55—73.
– Haute Autorité de santé. Evaluation thérapeutique du patient(ETP) Évaluation de l’efficacité et de l’efficience dans lesmaladies chroniques Actualisation de l’analyse de la littérature. 2018.
– Gross O. L’empowerment, accroissement du pouvoir d’agir, est-il éthique ? Santé En Action 2020;(453):20—2.9
– https://www.liberation.fr : article publié 15/04/2024
 
Article rédigé par Florence

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